Au théâtre, quand les fantasmes des hommes se transforment en fantômes, on les appelle des spectres. Ils viennent aux heures critiques, aux heures sombres. Ils sont et ne sont pas de ce monde. Et sur eux, pour un temps, se fixe l’angoisse. Mais on sait depuis Hamlet que les spectres doivent leur apparition à une certaine pourriture du royaume.
Olivier Saccomano écrit pour le théâtre et codirige la compagnie du Zieu avec Nathalie Garraud, metteur en scène. Ensemble, ils ont conçu un cycle de création sur la figure de l’étranger, Spectres de l’Europe.
« Le cycle Spectres de l’Europe, initié en 2013, est une enquête théâtrale sur la façon dont l’Europe se construit, dans la matérialité de ses frontières, dans la texture de son idéologie, dans l’obscurité de ses fantasmes, vis-à-vis de ceux qu’on appelle les étrangers. Pourtant notre entrée première n’est pas le « racisme », ni le « rapport à l’Autre ». Ni humanisme ni psychologie générale. La question est pour nous plus concrète et plus abstraite, plus politique. On ne fait pas des lois sur le statut de l’Autre. Et le racisme n’est qu’une traduction, dans la crainte et la jalousie, des rapports de rivalité et de concurrence qui guident les hommes du marché.
Le cycle se compose de trois pièces radicalement différentes, par leur forme, par leur dispositif comme par le rapport au public qu’elles proposent, et qui doivent nous permettre chacune de travailler une facette de notre question. »
Les deux premières, deux « pièces d’étude », ont déjà été créées : L’Avantage du printemps en 2013 et Othello, variation pour trois acteurs, librement adapté de Shakespeare – une transposition de l’histoire du Maure de Venise dans le monde actuel – lors du festival d’Avignon en 2014.
Olivier Saccomano est en résidence à la Villa La Brugère pour y finir d’écrire la dernière pièce du cycle, Soudain la nuit, « une farce historique contemporaine ».
Aux heures pesantes de l’histoire
Il faudrait un immense rire, et que ce monde fiévreux
Se défasse dans une farce, plus légère et plus impitoyable
Que toutes les tragédies.
Soudain la nuit a été présenté au Festival d’Avignon en 2015.