Résidence

Laure Limongi

15.06.2011 - 27.06.2011

Laure Limongi a poursuivi, à La Brugère, son travail sur Soliste, roman inspiré par la figure de Glenn Gould, qui sera publié aux éditions inculte en 2013.

L’éditeur le présente ainsi :

 » Glenn Gould est-il vraiment mort en 1982 ? Soliste décrit un personnage qui lui ressemble fort, habitant ses obsessions, ses gestes, sa virtuosité… Dans une ville de taille moyenne, Glenn – qu’on appelle à présent Thomas – se terre, se fond dans le paysage. Il croise le parcours de personnages pittoresques : le vieux René à la gouaille hardie qui contraste avec la rigueur du pianiste ; une coiffeuse philosophe dressant un constat sans concessions de la société actuelle ; un étudiant fasciné par les figures de faussaires. Et une jolie serveuse qui tombe sous le charme de son détachement élégant. Incognito pour survivre à un monde oppressant, Glenn-Thomas n’en développe pas moins dans ces pages le cœur de son art : sa passion pour le grand nord et la solitude, son amour des animaux, sa terreur des salles de concert, sa précision interprétative… On découvre une personnalité attachante et drôle, complexe. Et au fil du récit, on se demande : Glenn Gould a-t-il feint sa disparition en 1982 pour mener une existence tranquille loin des contraintes de la notoriété ? A-t-on affaire à un imposteur ? Empruntant et adaptant la structure des Variations Goldberg, trente-deux parties aux motifs qui se répondent, Laure Limongi livre un récit sensible qui célèbre l’icône du pianiste tout en livrant une histoire originale, en prise avec les préoccupations de notre temps. »

A la lecture, on découvre que le personnage de Soliste semble bien être venu à Arromanches :

« Après un peu plus de trois heures de route, il atteint son paradis. Un paysage comme un désert, à marée basse. Entourée de deux falaises, la baie est un miracle pour l’œil. Les couleurs y changent de minute en minute au gré du temps – si capricieux que sa versatilité s’est transformée en caractère –, ce qui lui permet de satisfaire sa manie de classification des couleurs : « céladon tendre », « turquoise mais presque », « acier détrempé », « déjà outremer »… À deux kilomètres du rivage, les vestiges d’une guerre ancienne sont toujours là, sous la forme d’un port artificiel dont quelques éléments ont survécu aux intempéries. Certains pontons se sont détachés de la structure et approchés du rivage. Des sculptures disposées par la main savante de la nature, qui ponctuent l’étendue sableuse de la plage. Ils sont habités de crustacés et petits coquillages, leur béton a appris à se faire d’un gris flattant les vagues. À marée basse, le sable cranté semble dessiner les côtes d’une bête. Une immense bête qui aurait des côtes minuscules, terriblement nombreuses, et une peau si fine. On a le sentiment de marcher sur un grand animal doux qui prête le flanc au promeneur par simple défaut de méfiance. Jamais il ne sursaute. Au contraire, il accueille le pas avec grâce et bienveillance, dispensant sa beauté inépuisable. Bienheureux celui qui a conscience de la magie qui opère, goûtant une seconde de cette contemplation iodée comme un trésor d’éternité. La première fois qu’il a assisté à un coucher de soleil là-bas, c’était si beau qu’il s’est surpris à pleurer. La mer clapotait très loin, il était seul sur cette étendue claire à des kilomètres à la ronde. Le vent sifflait doucement, donnant une plus grande conscience de l’espace, encore. Le soleil faisait des percées démiurgiques dans les nuages, on aurait dit la scène peinte. Le long du rivage, des centaines de tout petits pagures roulaient sur le sable, au rythme de la respiration marine. Tout miroitait tranquillement. Et il a fallu quitter la scène… »

Laure Limongi

Laure Limongi

RÉSIDENCES RENCONTRES ATELIERS CARTES BLANCHES